SUR LES CHEMINS DE LA VIE, COMBIEN DE PETITS ALI ?

« Je veux aller à l’école ». Ali Ahmad Saïd Esber est né le 1er janvier 1930 dans un village de Kassabine, près de Lattaquié, en Syrie. Enfant, il aime écrire, plus précisément, des poèmes. « Je veux aller à l’école ». Lorsque le jeune garçon rencontre le Président de la toute jeune République syrienne, venu en visite dans une commune voisine, il souhaite lui lire les vers qu’il écrits. Impressionné par sa précocité, le Chef d’État lui demande alors à ce qu’il souhaite et Ali de répondre : « Je veux aller à l’école ».

Plus vieux, il découvre la légende de l’amant d’Aphrodite, et signe à partir de 1947, ses œuvres du nom d’Adonis. Après son exil à Beyrouth, autre terre martyre, en 1985, il choisit la France. Aujourd’hui Adonis ne va plus à l’école, mais nominé à plusieurs reprises, depuis 2011, il figure parmi les favoris du Prix Nobel de littérature et reste l’un des grands poètes actuels.

« La poésie rend la vie sur terre plus belle, dit-il moins éphémère et moins misérable ». « La guerre, ajoute-t-il, lutte collective, relève de l’esprit de troupeau et fait régresser l’Homme vers la barbarie et la fin de l’humanité ». « Je veux aller à l’école ». A Fourmies, lors de la présentation culturelle transfrontalière, « combien de petits Ali, s’interrogea Jean-Jacques Thomas, tentent d’échapper à la mort sur les routes du monde, dans les camps surpeuplés ? Combien rêvent, comme lui, d’apprendre et de vivre ? Confortablement assis dans ce magnifique théâtre, sommes-nous, capables de les entendre ? ». 

« Je veux aller au théâtre ». « Je veux aller au concert ». Le Maire d’Hirson d’ajouter : « Combien d’Adonis en devenir frappent à nos portes fermées ou tout juste entrouvertes ? Cette saison culturelle, je la dédie donc à tous les petits garçons, à toutes les petites filles d’Avesnois, du Hainaut, de Thiérache et d’ailleurs. A tous les kit Armstrong du monde. A tous les sacrifiés qui rêvent de grandir grâce à la culture universelle ».

Créée en 1996 entre Chimay, Fourmies et Hirson, la saison culturelle transfrontalière voulait, et veut toujours, effacer les frontières entre les villes. Cependant, ces frontières sont, parfois, renforcées sur terre et dans les cœurs. Elles empêcheront à de petits Ali de devenir des Adonis, ouverts au monde et à la liberté. « Il n’est chemin pour l’amour, écrit le poète syrien, qui ne soit vertical ». D’ajouter « La poésie, l’art, sont un prolongement de l’existence ». « C’est sur ce chemin de la vie, conclut Jean-Jacques Thomas, que je vous convie. Puissions-nous y rencontrer et, surtout, y écouter de nombreux petits Ali nous dire plein d’espoir : « Je veux aller à l’école ».