« SOLDATS RUSSES, SI VOUS FAITES CELA, VOUS SOULÈVEREZ L’EXCÉCRATION DU MONDE CIVILISÉ ».
« Soldats russes, redevenez des hommes. Cette gloire, vous est offerte en ce moment, saisissez-la. Si vous continuez cette guerre sauvage, si vous officiers, qui êtes de nobles cœurs, mais qu’un caprice peut dégrader et jeter en Sibérie, si vous soldats, serfs hier, esclaves aujourd’hui, violemment arrachés à vos mères, à vos fiancées, à vos familles, sujets du knout, maltraités, mal nourris, condamnés pour de longues année et pour un temps indéfini au service militaire, plus dure en Russie que le bagne ailleurs.
« Si vous qui êtes des victimes, vous prenez parti contre les victimes, si à l’heure sainte ou la Pologne vénérable se dresse, à l’heure suprême où le choix vous est donné entre Pétersbourg où est le tyran et Varsovie où est la liberté, si, dans ce conflit décisif, vous méconnaissez votre devoir, votre devoir unique, la fraternité (…), soldats russes, inspirez-vous des Polonais, ne les combattez pas. Ce que vous avez devant vous en Pologne, ce n’est pas l’ennemi, c’est l’exemple ».
Ce 11 février 1863, en exil à Hauteville-House, à Guernesey, pendant les quatorze dernières années de son exil, Victor Hugo s’adresse aux soldats russes qui ont envahi la Pologne. Sur la scène de l’Eden, la lecture de cette article paru dans le journal « La Presse » est d’une étonnante modernité. Face à Jean-Marie Galey, ancien pensionnaire de la Comédie française, le public ne pouvait que dresser un émouvant parallèle avec l’Ukraine contemporaine.
Mieux, avant le duo avec Teresa Ovidio sur des poèmes de Kamal Zerdoumi, la supplique de Victor Hugo touche les cœurs et les consciences lorsque l’écrivain rappelle que « Les crimes de la force restent des crimes ». Aujourd’hui, sans doute, il écrirait « vous consommez l’assassinat de l’Ukraine (…), si vous faites cela, vous soulèverez l’exécration du monde civilisé ».